[color=white]Une vingtaine de plaquettes s'allignaient sur une distance d'un kilomètre de couloir, on pouvait y lire le titre d'un conte ou le nom d'un personnage célèbre, on pouvait également y voir le nom de l'occupant de la pièce. L'Ogre...Willemina Anya Arlington? Pourquoi donc? Elle ne se qualifiait elle-même d'ogre et le titre de vipère lui aurait assuré ce qu'elle était vraiment, mais au fond, après mure réflexion, Mina était peut-être un ogre, paradoxalement bien sûr, mais tout de même. Quoiqu'il en soit, elle se plaisait à voir les lettres de son nom figurer sur la plaque d'or étincellante. Chaque porte, bien qu'elle eût porté la même plaque d'or, était faite d'une matière différente, le plus souvent, à l'image de son ou de sa propriétaire. Celle de la croqueuse de diamants était fabriquée de bois d'ébène et la poignée d'un bronze laquée et lustrée; elle comportait beaucoup d'artifices et ses nombreux arabesques rapellaient vaguement les riches décorations indiennes toutes droit sorties des contes des milles et unes nuits. Lorsque l'on poussait la lourde barrière entre le couloir et la chambre, on pénétrait dans un univers totalement irréel de richesse et de luxe. À l'extérieur, on ne se serait douté de l'espace grandiose qui se prévalait à l'intérieur et lorsqu'on en était enfin entré, on en avait le souffle coupé. La première chose saisissante était la peau d'ours étendue devant la porte, le poil d'un blanc d'émail luisant sous la lueur des nombreux lustres, de pacotille, bien entendu, mais la réplique était plus que trompeuse.
La chambre était divisée en trois pièces à commencer par le vestibule dont le lustre éclairait fortement les faux portraits des peintres célèbres, La Cène entre autres y était répertoriée ainsi que la Vierge aux Rochers de Da Vinci. Une chaise doublée de plumes d'oie aux coussins de velours d'un blanc écru et aux dorures apparentes était située à côté d'un porte-manteaux en or plaqué efflanqué de pièces de fourrure et de chapeaux à filet noirs ou verts. De l'autre côté, un petit lutrin portait un énorme registre à la reliure gris-cendre dont les pages étaient tachées d'encre noire portant les noms de ceux qui étaient entrés dans ce palais. Puis, devant, une autre porte, à double volets cette fois, débouchait sur une chambre astronomique pourvue de draperies lourdes ourelées de soie argentée et dont le velours vert étincellait tel une plaine ondoyante au soleil des lustres. Un énorme lit à baldaquins est alligné sur le mur frontal, des draps d'albâtre et un couvre-lit vipérin. Il faut gravir quelques marches de pierre pour y parvenir.
[À terminer]
