Un bruissement sec se fit entendre, suivit presque automatiquement d'une rafale de feuilles. Au travers l'orangé et le carminé des feuilles de grenadier se dévoilèrent deux grands yeux d'un bleu turquoise à la luminescence enfantine. Les éclats de rire ne se privaient pas de fuser à travers l'atmosphère silencieuse et calme de l'étrange forêt. Cette voix, ces yeux n'appartenaient à nul autre qu'au petit Matteo Di Vernuzzio, enfant unique conçu par l'amour d'un frère et d'une soeur; Ugo et Lena Di Vernuzzio. Animé par son éternel sourire de jouvenceau, le visage de Matteo rayonnait, cela faisait maintenant un bon quart d'heure que le bambin s'amusait à plonger dans les petits tas de feuilles mortes qui s'amoncelaient au pied des arbres. En prenant congé de sa nounou, il s'était lentement glissé vers la forêt, tout en sachant que cet endroit lui était formellement interdit, il avait suivit le sentier de galets dorés et avait découvert une petite clairière dominée par les nombreux grenadiers qui contenaient, en saison estivale, de succulents petits fruits rouges.
Toujours en continuant de farfouiller dans les feuilles, il prenait le temps d'écouter tous les sons de la forêt; les petits oiseaux qui chantaient, le clapotis des ruisseaux et le crépitement des feuilles lorsque ses petits pieds les écrasaient sans ménagement. N'importe quelle âme perdue dans cette forêt se serait demandé ce que faisait un enfant aussi jeune seul dans la forêt, mais Matteo n'était pas comme tous les enfants, il était gratifié d'une intelligence rare pour son âge et ses répliques à tendances cyniques en auraient étonné plus d'un. Quoiqu'il en soit, le gamin était assez spécial et il fallait savoir s'adapter à son comportement parfois puéril et d'autres fois si mature. C'était un paradoxe en soi, car Matteo était un paradoxe. D'Ailleurs, la seule personne ayant les facultés nécessaires pour comprendre le petit Matteo était Angy, sa nounou.
Alors qu'il pataugeait toujours dans les feuilles, il en eut soudain marre de ses activités et décida d'explorer un peu les environs. Il s'inventa un nouveau jeu qui consistait à suivre un renard roux sans que celui-ci s'apperçoive de la présence du bambin, il rigolait bien, mais son jeu s'arrêta net lorsque le canin l'entraîna jusqu'à un endroit parsemé d'arbustes arborescents. Apparement, une femme était assise sur un rocher. Matteo détailla qu'elle semblait pensive. En tout cas, elle était très belle aux yeux du petit garçon de huit ans. Un léger sourire narquois se dessina sur les lèvres du jouvenceau. Il passa frénétiquement sa main sur son visage pour se nettoyer des traces de poussière et pour repousser ses longues mèches brunes qui l'empêchaient de voir correctement. Alors qu'il continuait son observation, il fit un mouvement brusque et s'écorcha le poignet sur un pic rocheux. Il poussa un cri et se lova contre le tronc d'un arbre. Étant hémophile, le sang se déversait trois fois plus rapidement que la moyenne des gens, il était mortifié en voyant tout ce liquide rouge couler de la plaie. Il supplia de l'aide d'une voix faible en espérant que la jolie dame l'entende et puisse lui venir en aide.